Je suis au chômage et alors ?

A l’époque où j’étais au chômage et que j’en pouvais plus, mon amie Anne me dit : « Ce qui est chiant quand t’es au chômage, c’est qu’on ne te parle plus que de ça alors
que quand tu sors, c’est justement pour te changer les idées ». Le chômage, c’est une maladie sociale, les gens se préoccupent de votre état. Ca part d’une bonne intention mais c’est vite étouffant.

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Quand tu es au chômage, on te demande toujours « alors, tu as trouvé du boulot ? ». Ce à quoi, tu as toujours envie de répondre : « bah, bien sûr, ça fait deux mois que je bosse mais j’avais envie de garder ça pour moi, tu comprends… ». C’est un peu la question du « t’es allé chez le coiffeur » quand t’as coupé 10 cm de cheveux. Surtout que je disais à l’époque que le jour où je trouverais du boulot, la Terre entière serait mise au courant. J’ai d’ailleurs envoyé un texto aussi sec à tout mon répertoire puis j’ai fait trop ma maline sur mon blog.

En général, les gens sont bourrés de conseils parfois assez hallucinants. J’ai parlé du « pourquoi tu crées pas ta boîte ? », des « tu réponds à des annonces ? », les « tu envoies des candidatures spontanées ? ». Des fois, j’avais l’impression d’être une petite fille qui découvre le monde et à qui on apprend l’évidence. Mais j’avais saisi dès le départ qu’un recruteur ne viendra jamais sonner chez moi pour me proposer un boulot. C’est pas comme les agents immobiliers qui garnissent ma boîte aux
lettres de proposition de vente (alors que je suis locataire). Tout le monde y va de son petit conseil, y compris et surtout ceux qui n’ont jamais connu le chômage. Parfois, on a des trucs assez hallucinants du genre : « Ben, tu te pointes au journal et tu montres ton book au rédac chef ! ». Quand je lui ai fait remarquer qu’un journal n’était pas forcément un moulin et que le rédac chef ne passe pas sa journée à attendre dans son bureau de potentiels candidats, le gars m’a expliqué le plus sérieusement du monde que j’avais qu’à me pointer en inventant un prétexte et une fois dans la place, je vais l’air de rien dans le bureau du rédac chef. Mais bien sûr. La plupart des grands groupes de presse sont équipés d’accueil et de portiques et si t’as pas rendez-vous avec une personne précise qu’on appelle pour prévenir de ton arrivée, ben tu rentres pas. Et puis je suis pas sûre que rentrer dans le bureau du rédac chef sans rien demander à personne soit très bon pour mon image…

Vous avez aussi les gens circonspects, ceux qui vous soupçonnent de ne pas chercher vraiment. C’est vrai, le chômage, j’ai adoré, passer la journée chez moi à guetter l’annonce, à envoyer 150 CV partout pour me prendre des refus, c’est tellement bon pour mon ego ! Des fois, j’ai envie de démissionner juste pour revivre cette période magique où je me sentais à peu près aussi estimable qu’une crotte de souris, une mini crotte, quoi. Et ça rend parano, le chômage, la sollicitude des autres semblent devenir des accusations à mots couverts, on part au quart de tour. « Tu réponds à des annonces ? » « Tu sous-entends quoi, que je cherche pas vraiment ? Tu crois que c’est facile de trouver du boulot (ducon) ? Tu les connais les stats ? Tu sais combien y a de chômeurs en France ? ». Oui parce que bon, je suis pas tout à fait la seule dans ce cas là et d’après l’APEC, un jeune diplômé met en moyenne un an et demi à trouver du boulot et passe en moyenne 7 entretiens avant d’être embauché. Le jour où ma sœur m’a parlé des 7 entretiens, dans le but de dire « hé mais tu te rapproches, regarde les entretiens que tu passes, ne panique pas ! », j’ai eu envie de pleurer. Parce que 7 entretiens, ça veut dire que 6 fois, on aura trouvé quelqu’un plus compétent que vous. Alors, c’est vrai que des fois, on passe des entretiens en étant des erreurs de casting. Je me souviens d’un entretien notamment avec un mec que j’avais déjà croisé mais je n’ai pas percuté au moment de l’entretien, légèrement perturbée par le fait qu’il ressemblait à un de mes exs. Le poste n’avait rien de junior et les gars ont surestimé une de mes expériences. Parce que bon, un premier job rémunérée en tant que chef éditorial d’un site web avec gestion de pigistes, ça fait rêver mais soyons un peu réaliste.

Bref, le chômage, c’est pas la joyeuse glande, c’est plus vexation, culpabilité et déprime. Sans parler du fait que vivre avec le RMI ou les assedics pour ceux qui y ont
droit, ce n’est techniquement pas possible, surtout sur Paris. Donc soupçonner quelqu’un de ne pas faire l’effort de se sortir de la situation, c’est vraiment méconnaître la situation. Il y a trois mois, quand Guillaume 1er a décroché un contrat, il m’a dit « tu peux pas savoir comme je suis content de me lever le matin ! ». Et si, je sais, j’ai ressenti la même chose la première fois que mon réveil a sonné pour que j’aille bosser. Bon, depuis, je suis beaucoup moins heureuse sur ce sujet mais c’est fou comme mon amour propre est remonté depuis que je ne suis plus obligée de répondre que je suis au chômage à la question « et toi, tu fais quoi dans la vie ? »

18 réflexions sur “Je suis au chômage et alors ?

  1. Courage dans tes démarches… Je fais parti de ceux qui n’ont pas connu ca… Donc, j’ai du mal à imaginer comment ça se vit mais… C O U R A G E

  2. la prochaine fois faut ecrire encore plus petit, a moins que ce soit une periode tellement psychologiquement traumatique que tu a mis cettepolice xx small inconsciemment …

    code min

  3. EPP, je ne suis plus au chômage depuis quasiment un an. T4es pris en flagrant délit de non lecture d’article ! 😉

    Périph, c’est la police de base, ‘jai oublié de l’agrandir en publiant l’article.

  4. C’est amusant, moi c’est totalement l’inverse , cela fait 5 ans que je suis au chomage et rien ne me ferait plus peur que de travailler. D’un autre coté je ne vis pas à Paris et j’ai réussi a convaincre amis et famille que le chomage c’est la retraite des jeunes et que l’on peux être très heureux comme ça. Le bonheur c’est très personnel comme sensation.

  5. Ca dépend de ce que tu fais de tes journées, fx. Pour moi, l’inactivité, c’est la mort. Pourtant, j’ai toujours des milliers de trucs à faire mais si je reste chez moi, je déprime.

  6. Très juste, rien de pire que de voir tout le monde s’imaginer qu’on se complait dans l’inactivité, du coup moi ça devient le sujet à ne pas aborder: « si de toutes façons tu doutes de ce que je te dis, je vois pas pourquoi je me ferais chier à t’en parler. »

  7. Le truc quand tu est au chomage, c’est que le premier mois tu as encore le rythme du boulot, donc tu fait les trois quart de ce que tu avait laissé en plan, puis tu t’habitue à n’avoir aucune contrainte et tu fini par avoir peur de bosser (@fx: tu n’est pas visé, ne t’en fait pas).

    Pour ce qui est des entretiens avec les grandes entreprises (et le coup des 7 entretien), j’ai découvert un truc une fois qui m’a complètement effaré:

    Pour mesurer le dynamisme des entreprises, il est pris en compte, le nombre d’offre d’emploi publié, et le nombre d’entretien passé.

    Comme c’est principalement les grandes entreprises qui sont présentent dans ces mesures, elles ont tendances à multiplier les entretiens (notre processus de recrutement s’effectue en 15 entretiens, quand tu habite à 300km, c’est le bonheur).
    Voir à publier de fausses annonces avec entretiens et recalage systématique…

    Bon d’un autres coté, les grandes entreprises ayant plus souvent habitude de recourir à la sous-traitance qu’à l’embauche, il faut bien leur faire garder les habitudes des entretiens aux RH.
    Mais c’est pas cool pour le candidats.

    Du coup, les recalés ont le droit de philosopher, le fait qui ne soit pas pris ne signifie pas forcement qu’ils soient moins bon, mais que le poste n’existe peu être pas dans la réalité.

    Je précise que ces manières ont lieu essentiellement dans le domaine de l’informatique / télécoms / réseaux.
    Pour donner un exemple, il est identifié que 10% minimum des annonces de recrutement d’I*M dans le monde sont des fausses.

    Bon et puis c’est pas tout, mais déprimer cela ne sert à rien, à pars à empêcher celui qui le produit de réfléchir tranquillement.

  8. Je vis tout ça en ce moment…
    Ma mère pense que je ne cherche pas vraiment
    je ne sors presque jamais car avec le RMI c’est vraiment dur meme si par chance j’habite toujours au domicile familiale…
    Mes copines m’envoient des offres (deja vu) comme si je ne savais pas chercher!!
    et puis les entretiens, je dois pas etre loin du 7e donc j’espere qu’au 7e ca sera le bon…

  9. Les chomeurs sont comme les immigrés, des poids qui coutent cher a la societé et aux gens biens qui font l’effort de travailler. On devrait leur couper les allocs, ca les pousseraient a le chercher leur emploi, plutot que de rester dans le pallier de leur immeuble a dealer du shit.

  10. Matt => Tu penses que quelqu’un pourrait dire ce que je dis serieusement ? Je ne connais pas toutes les couches de la population mais tout de meme, si tu dis vrai c’est a faire peur..

  11. Waw… ce qui me fait peur c’est que j’en fait constamment du 2nd degrés, ya pas mal de types qui doivent me prendre pour un queutard d’extreme droite raciste et homophobe.

  12. Bravo pour cet article je me reconnais dans vos propos. J’ai envie de vous embrasser tellement ce que vous dites me fait du bien et correspond à mon quotidien depuis 6 mois. J’ai 28 ans, un dess et un mba. Je rentre de Chine ou j’avais créé une entreprise. J’ai même écrit un livre! Mais trouver un emploi est très très dur. Je ne correspond pas aux demandes: pas assez d’expérience, trop âgé, n’a pas été dans une école classique française, trop diplômé, n’a pas le permis (et j’essaye de le passer) etc… etc… Comme vous j’envoie 100, 150 candidature. Je vais à l’ANPE, aux maisons de l’emploi. J’écris des lettres. Je me déplace. On me répond que ma candidature est excellente mais rien ne suit. Parfois on me reçoit sans suite. Parfois je déprime. Je n’ai pas envie de communiquer avec mes amis car honteux d’avoir à subir leurs remarques, devoir répondre à leurs intérogation et leurs pseudo conseils (tu devrais… pourquoi tu ne trouves pas avec ton parcours… Il faudrait aller… blablabla), tel que vous le décrivez. Je me défonce en faisant du sport et je m’en veux d’avoir choisi les mauvaises études? le mauvais chemin? J’en veux aussi à l’Etat de ne pas m’avoir averti ou orienté autrement. L’Etat n’est-il pas responsable des citoyens? La société ne veut pas de moi et pourquoi? Car ma vie personnelle ne peut pas évoluer non plus. Mon amie est étrangère et elle ne peut me rejoindre en France tant que ma situation n’est pas stable. Je ne me plains pas mais je suis très en colère. Et j’apprécie beaucoup votre article.

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