« Si je ne m’étais pas retenue, je l’aurais descendue sur place, cette sale latino ! On aurait dû les mettre hors la loi, ceux-là aussi !
– Ma mère était mexicaine. J’aurais été un esclave, moi aussi, si ça avait été le cas.
– Chacun sa croix. Cette petite garce ne nous a même pas donné le nom d’Oceany ! J’étais persuadée que je pourrais l’avoir, cette salope, mais ça a échoué.
– Maria prétend travailler seule.
– Elle la couvre, t’as pas compris ? Bon sang, je suis entourée d’incapables ! Par moment, je me dis que tu ne vaux pas mieux que Bill, qui n’est pourtant pas une lumière.
– Parce que tu te crois supérieure à nous, peut-être ?
– Je ne me crois pas supérieure, je le suis. Je n’ai qu’à lever le petit doigt et on retrouvera ton cadavre dans une benne au rez-de-chaussée à moitié bouffé par les chiens. Alors, un conseil, ne
me parle plus jamais comme ça. »
Elle le fusilla du regard puis quitta la pièce, pour aller voir le grand patron. Seul lui la comprenait, il l’apaisait, il était si bon avec elle. Elle l’aimait plus que tout et elle s’était jurée
de faire tout ce qu’il lui demandait, y compris épouser et coucher avec Oxford. Quant à Bryan, il n’était rien pour elle, elle couchait juste avec lui pour compenser car elle ne pouvait pas faire
l’amour avec le grand patron. Elle pouvait à peine le toucher, mais elle était devenue la seule personne avec qui il communiquait et ce privilège suffisait à la rendre heureuse. Il allait oublier
ceux et celles qu’il avait aimés avant, même s’ils se comptaient sur les doigts de la main. Elle serait bientôt la seule femme de sa vie, la seule.
Oceany sortit de sa chambre et alla à la cuisine, le cœur battant ; Et si quelqu’un s’était aperçu de son absence ? Mais elle fut rassurée dès qu’elle entra dans sa pièce et
vit sa mère lui sourire, tandis que son frère était en train d’engloutir un immense bol de céréales : tout était normal. Elle avait une folle envie de tout raconter à sa mère, de lui parler du
bonheur qu’elle ressentait, mais elle ne pouvait pas. Elle était censée se fiancer à Mark le lendemain soir et Alyson semblait avoir tellement été blessée par l’amour dans sa jeunesse qu’elle
réagirait peut-être mal. Elle s’assit donc à sa place et resta un instant à regarder les deux êtres qu’elle aimait le plus que tout, le cœur gonflé d’amour et de confiance. Au moment où elle avait
commencé à douter, Ethan lui avait montré la voie à suivre, et elle était plus déterminée que jamais.
« Bonjour ma chérie ! commença Alyson. Bien dormi ?
– Ca va.
– Tu as l’air particulièrement rayonnante, ce matin ! J’imagine que tu es pressée de te fiancer.
– Oui, ce doit être ça.
– Tu dois commander un joli costume pour l’occasion. Tu seras la personne la plus importante de cette fête, tu dois montrer à tous que tu es digne de ton rang et de ton nom.
– Tu te déguiseras en princesse, dis ? demanda Oliver.
– Je ne sais pas encore.
– Moi, j’aimerais bien ! Moi, je vais me déguiser en petit lutin.
– Tu seras très mignon, j’en suis certaine.
– Si tu veux, je peux te montrer mon costume.
– Non, je veux que tu me fasses la surprise pour demain soir. D’accord ?
– Oui, mais alors, toi, tu te déguises en princesse, d’accord ?
– Promis.
– Super ! Bon, je vais aller regarder ce qu’il y a de beau pour toi. Tu viens dans ma chambre avec moi ?
– J’arrive, je prends mon petit déjeuner et je suis à toi. »
Le petit garçon poussa un cri de joie et partit en courant dans sa chambre car il avait beaucoup à faire. Il était si sage pour un enfant de son âge, c’était une véritable perle. Oceany espérait
avoir un fils comme lui, un jour.
« Ca va lui fendre le cœur quand tu partiras.
– Quand je partirai où ?
– Tu te fiances demain soir, Oceany. Tu vas bientôt te marier avec Mark et tu iras vivre avec lui.
– Ah, oui, c’est vrai. Je n’ai pas envie de vous quitter.
– Tu ne pourras pas rester éternellement avec nous, voyons ! Tu dois vivre ta vie.
– Tu aimerais te baigner dans l’océan ?
– Pourquoi tu me demandes ça ?
– Pour savoir. Moi, j’aimerais savoir ce que ça fait de se baigner dans ces eaux salées et puissantes. Ca change des piscines chlorées et désespérément immobiles.
– Je me souviens quand j’étais adolescente, je passais mes étés au bord de la mer, sur la plage, à regarder les garçons faire du surf et à m’éclabousser joyeusement avec mes amis. Mais c’était un
autre temps.
– Je veux que tu viennes avec moi te baigner un jour.
– Enfin, chérie, l’océan est pollué et c’est trop loin et puis, pourquoi quitter la ville ? On est très bien ici, je…oh, Seigneur, ça recommence !
– Quoi ?
– Je n’ai jamais rien détesté autant que cette ville et pourtant, je n’arrête pas d’en dire du bien. Je deviens folle !
– Non, ça n’a rien à voir avec la folie, c’est juste que tu es endoctrinée comme tout le monde. Je ne sais pas comment ils s’y prennent, mais chaque habitant vénère cette ville alors que c’est une
véritable prison. Sans doute parce qu’ils n’ont plus besoin de rien et qu’ils n’ont plus vraiment de raisons de se plaindre.
– Toi, tu es comme moi alors pourquoi tu n’es pas victime de leur propagande ?
– Je ne sais pas. Peut-être parce que je ne me sers pas beaucoup de tous les outils qu’on m’offre, ce qui m’évite de m’extasier à tout bout de champ. Qui sait ?
– Je veux partir d’ici, ma vie en dépend. Si je reste ici trop longtemps, je vais devenir folle. Aide-moi à sortir d’ici.
– Oh, maman, je suis tellement contente que tu me le demandes ! Je t’aiderai, toi et Oliver et même Nicholas si tu y tiens. Nous serons tous heureux, ailleurs. Je te le promets. »
Elle étreignit sa mère et ne put s’empêcher de verser quelques larmes de bonheur. Tout s’arrangeait comme elle le voulait, elle espérait que ça allait continuer.
« Ce serait l’occasion rêvée pour un coup d’éclat, non ? »
Mai était plantée devant Juan, les mains sur les hanches, bien décidée à le persuader de marcher dans sa combine, mais son acolyte ne semblait pas d’humeur à discuter. Depuis sa dispute avec Maria,
il s’était un peu refermé sur lui-même et ses grands yeux noirs trahissaient sa tristesse. Oceany et Ethan choisirent ce moment-là pour arriver, ce qui ne pouvait pas mieux tomber. Si elle arrivait
à convaincre la jeune femme, Juan suivrait forcément.
« Oceany vient voir deux minutes ici. Juan et moi ne sommes pas d’accord sur la marche à suivre.
– A propos de quoi ?
– De tes fiançailles : pourquoi ne pas en profiter pour faire un coup d’éclat ?
– Parce que je n’ai pas envie de sauter à cause d’un attentat.
– Je ne pensais pas à ça, mais à une bonne blague. On va semer la zizanie dans cette stupide fête.
– Ca s’appelle de la provocation, ça, Mai.
– Oui, je sais, mais qu’est ce que tu as fait, toi, en allant libérer Kirstie ? Si c’est pas de la provocation, ça ! J’ai juste envie qu’on fasse une bonne blague à tout ce monde et qu’on leur
fasse comprendre qu’il ne faut pas nous sous-estimer.
– C’est totalement inutile, Mai ! protesta Juan. Je n’ai pas envie de jouer à ce jeu-là et puis, avec tes yeux bridés, tu risques de ne pas aller bien loin.
– C’est une soirée costumée, personne ne verra mon visage. Et si on faisait exploser le gâteau ? Ca arroserait tout ce joli petit monde, ce serait amusant.
– Là, je ne suis pas trop pour. Normalement, je devrai couper le gâteau avec Mark et je n’ai pas envie de bousiller ma robe pour faire une blague.
– Depuis quand une robe a autant d’importance à tes yeux ?
– Cette robe, c’est Oliver qui me l’a choisie ; j’y tiens.
– Oh, je comprends. J’y pense : M Oxford va faire un discours, sans doute. Après tout, ce sont les fiançailles de son fils.
– Oui, en effet, c’est ce qui est prévu.
– Parfait : on va s’inviter à la soirée, préparer un gâteau piégé qui sera amené par un robot piraté par nos soins.
– Tout le monde ne peut pas venir, on n’a pas assez de passes.
– Je dois venir, c’est mon idée, ainsi que Myo parce que c’est un génie pour pirater les robots. Quant à Juan, ça lui ferait du bien de faire un peu la fête.
– J’aimerais que Kirstie vienne aussi, intervint soudain Ethan qui n’avait encore rien dit.
– Pourquoi ? demanda Juan.
– Je pense que ça lui fera du bien de voir son ancien maître ainsi ridiculisé.
– Il faudra qu’on se procure un nouveau passe, alors, Maria nous en a volé un. Je m’en occuperai demain. Ma mère est de notre côté et ne dira rien si j’emprunte le sien.
– OK, je vais m’occuper immédiatement du gâteau ! »
Mai repartit gaiement vers son mari, pour lui parler de leur projet, mais Juan n’arrivait pas à partager sa joie, il avait un mauvais pressentiment. Il allait se passer quelque chose de dramatique,
il le sentait.
Oceany fourra les invitations dans son sac et se dépêcha de quitter l’appartement avant d’être attrapée par sa mère. Cette dernière était surexcitée à cause des fiançailles de sa fille et ne
cessait de harceler cette dernière pour qu’elle se prépare correctement afin d’être la plus belle. Mais Oceany s’en moquait éperdument ; peu lui importait ce que Mark pensait d’elle, elle ne
l’aimait pas. De toute façon, et si tout se déroulait correctement, elle n’aurait pas à l’épouser.
Elle prit le monorail qui la conduisit vers les premiers étages, puis se dirigea d’un pas vif vers le hangar où il n’y avait pas grand monde. Le jour, la plupart des rebelles menaient une vie
normale pour ne pas être suspecté.
Mai l’accueillit joyeusement et l’entraîna vers le centre de la pièce pour lui montrer son costume, qui n’était en fait que sa tenue habituelle de rebelle, à savoir sa combinaison argentée et son
masque ressemblant vaguement à un papillon.
« Alors, qu’est ce que tu en penses ?
– C’est marrant, j’ai la même à la maison.
– Je sais : ça va devenir notre marque. Ce soir, on sera tous déguisés comme ça.
– Tu n’as pas peur qu’on vous remarque un peu ? Quatre personnes déguisées de la même façon, c’est étonnant.
– Enfin, il va y avoir des centaines de gens, on sera masqué et maquillé ! Au pire, ils remarqueront qu’il y a deux personnes vêtues pareil, un homme et une femme, mais ils ne pourront pas savoir
que nous sommes quatre en réalité, ils penseront que Myo et Juan ne sont qu’un et me confondront avec Kirstie.
– A propos de Kirstie, si les gens voient sa peau noire, tu crois pas qu’ils vont se douter de quelque chose ?
– Juan nous a fourni du maquillage, on va tous se tartiner la figure de blanc, comme ça, personne ne verra la couleur suspecte de notre peau.
– OK, ça va, je vois que tu as tout prévu ! Alors, voilà, quatre invitations pour entrer dans la salle, plus le passe de ma mère que tu donneras à Kirstie afin de monter là-haut.
– J’ai hâte de voir cette fameuse salle de réception, Juan m’a dit qu’elle était remarquable.
– Oui, sauf que ça a lieu au Théâtre municipal.
– Ah ? Tu es sûre ? J’ai entendu à la radio que c’était à la salle de réception.
– Ce sont mes fiançailles, je suis quand même un minimum au courant. Ils ont dû faire une erreur, c’est tout. J’espère que tout se passera bien.
– Tu as le trac ?
– Hein ? Oh non, je ne parlais pas de mes fiançailles, mais de ton plan tordu.
– Tu n’as pas envie de te fiancer avec lui, n’est ce pas ?
– Tu sais, Mark est un garçon gentil, malgré tout ce qu’on m’a dit sur lui et je l’apprécie. Mais je ne l’aime pas et je crois que ce sera comme ça jusqu’à la fin de ma vie.
– C’est à cause d’Ethan ?
– Pardon ?
– J’ai bien vu qu’il te faisait de l’effet et j’ai senti que vous étiez très proches depuis quelques jours. A mon avis, vous vous ennuyez pas quand vous êtes tout seul.
– Mai ! On ne peut rien te cacher. Comment tu as su ?
– Tu oublies que je suis ta meilleure amie et une meilleure amie doit toujours deviner ce qui se passe dans la tête de l’autre. C’est un gentil garçon, tu as fait un bon choix, même s’il m’a
traitée de salope. Mais il a changé à ton contact, il a perdu ses idées racistes et ça, c’était vraiment pas gagné. J’espère que vous serez heureux.
– Je l’espère aussi. »
preum’s ? Preeeeeeeeeeeeeum’s !!! Et maintenant je lis…
« Je ne me crois pas supérieure, je le suis »… A un « e » près, c’est du moi tout craché…