(Cet article ne devrait pas parler des élections régionales, j’ai rien de plus à en dire…je crois. Quoi que j’ai un peu envie de vous faire un plaidoyer sur le vote à la proportionnelle)
L’autre jour, je vous parlais de ma consommation de magazines et de mon arrêt total de la presse féminine parce que “je les vois, vos grosses ficelles, j’aime pas trop trop être prise pour un lapereau”. Même si c’est mignon dans l’absolu, un lapereau.
Curieusement, ma conscience féministe accrue ces dernières années m’a permis de détecter toutes les injonctions de la presse féminine (maltraite ton corps, refuse ton âge, mincis, tu ne vaux rien sans homme, achète, achète, achète) et montrer les dents dès que j’en repère une. Par exemple, je dois l’avouer, je lis Voici quand je redescends chez mes parents. C’est curieux car je ne supporte plus ce magazine de par ses remarques grossophobes et viellophobes systématiques mais je sais pas, j’ai envie de me confronter à ça. Si Closer est un peu plus soft sur la grossophobie (un peu, ils se font plaisir sur Mariah Carey, toujours elle), eux, ils sont plus dans la glorification du couple (et de l’hétérosexualité). Du coup, je m’énerve, j’ai envie d’insulter tout ce petit monde sur Twitter. Oui, devenir féministe m’a rendu la lecture des féminins impossible, à moins de vouloir dénoncer (je veux bien mais je manque de temps pour faire un vrai travail de fond, hélas).
Sauf que ce petit “talent” à détecter les injonctions s’étend à l’actualité en général et je vois les grossières petites manipulations médiatiques et je deviens folle furieuse lorsque je vois l’ensemble de mes communautés plonger dedans tête la première. En ce moment, forcément, c’est festival : entre les attentats, la COP21 et les régionales, on parle à votre coeur en oubliant volontairement votre tête et toute cette manipulation me donne la nausée.
Je passerai sur les régionales, je pense que pour le coup, la mascarade est assez mal passée et le vote “barrage” a été mal digéré par pas mal d’entre nous. Mais quand même, je ne peux m’empêcher de faire claquer ma langue d’agacement quand je lis qu’on est en pleine crise politique, que le FN va passer, qu’on va tous mourir… Alors que ce discours est tenu depuis au moins 2002 et que déjà, en 98, le FN avait foutu le bordel dans les élections régionales mais à chaque fois, c’est la même histoire : on crie, on s’inquiète, on supplie… En fait, l’entre deux tours devient de plus en plus l’équivalent des 7 étapes du deuil : le choc “oh mon Dieu, on vit dans un pays de fachos”, le déni “non mais en fait, on croit juste ça parce que les gens se sont abstenus mais ils n’ont pas eu tant de voix que ça”, la colère et le marchandage : “Non mais tout ça, c’est la faute de ces connards d’abstentionnistes ! Bon allez, entre le FN et l’UMPS, le choix est facile, quand même, non ?”, la tristesse “j’ai mal à ma France”, la résignation “je vais devoir voter Wauquiez/Estrosi mais c’est pour la bonne cause”, l’acceptation “ok, on a un conseil régional pas ouf mais le FN a perdu alors c’est pas si mal” puis la reconstruction “allez, on va se battre pour pas que ça se reproduise en 2017!”. Oui alors là dessus, sans vouloir spoiler, je suis à peu près persuadée qu’on aura le même cirque dans 1 an et demi. Bref, en 17 ans, rien de neuf mais on a toujours droit à la même rhétorique : tu votes anti FN ou tu es un mauvais citoyen, comment a-t-on pu en arriver là et tutti quanti. On distribue les responsabilités en faisant bien attention à ne pas prendre sa part. Et c’est ainsi qu’on a facilement accusé les abstentionnistes, oubliant qu’en 2010 (la vague rose), le FN n’a pas tant fait chier alors que l’abstention était supérieure à celle de cette année (53.64% vs 50.09% au 1er tour). Surtout qu’au 2e tour cette année, le FN a fait plus de voix au 2nd tour qu’au premier alors qu’il y avait moins d’abstention. Du coup, ça veut dire qu’il y a des abstentionnistes frontistes, en fait ? Et sinon, taper sur les médias ou les politiques eux-mêmes ? Naaaaaaan, pensez donc.
Mais surtout, il y a eu la COP21 et la fameuse manifestation du dimanche 29 novembre, celle où j’ai eu envie de distribuer pas mal de claques. Reprenons : une manifestation interdite suite à l’état d’Urgence (je vais même pas commenter ce point, je deviendrais vraiment très vulgaire) même si la chaîne humaine avait bien été autorisée finalement. Pour être bien claire : je ne suis pas allée à cette manif car Victor ne voulait pas que je me mette en danger (il m’a amenée à une manif antifa juste pour vous situer que c’est pas un trouillard non plus) et que nous avions un rendez-vous en fin d’après-midi. On suit donc un peu les événements sur Twitter, on voit que ça commence à dégénérer dans la plus grande indifférence de ma timeline, à 3 ou 4 exceptions près. On annonce que ça commence à gazer, que des gens essaient de fuir la place mais se retrouvent bloqués par les CRS. Toujours grande indifférence de ma timeline, ça doit pas trop les déranger qu’on bouscule des hippies qui auraient dû rentrer chez eux, je suppose. Sauf qu’à un moment, l’info fuse : des manifestants auraient pris des bougies du Mémorial pour les jeter sur les CRS. Et là, ma timeline bien passive se met à s’énerver, à traiter les manifestants de tous les noms. Mon Dieu, vous êtes vraiment tous en train de tomber dans ce grossier piège ? Les ficelles sont aussi grosses qu’un tronc de séquoia !
Alors pour être tout à fait honnête, ce Mémorial ne m’évoque pas grand chose. Je suis pas quelqu’un attachée à ce genre de symboles : je comprends que certains le soient mais de là à cracher à la gueule de toute une foule qui se retrouvait prisonnière de la place à ce moment là, faudrait voir à réfléchir avant de condamner comme de dociles moutons. Ok, s’attaquer au Mémorial était une bien mauvaise idée mais je vous ai pas entendus gueuler quand des gens ont piétiné ledit Mémorial dès le dimanche après les attentats quand ils ont cru être attaqués ou quand les flics l’ont ruiné alors qu’ils étaient en train de “maîtriser” des manifestants. Juste pour info : sur les 317 gardes à vues suite à cette manif, seules 2 ont abouti sur une mise en examen… sans rapport aucun avec le Mémorial ou les Blacks Blocs. Mais vous avez marché dans l’histoire parce qu’elle repose sur les mêmes mécanismes que les fables qu’on nous sort depuis janvier : l’émotion. Je suis choquée de voir que vous êtes plus préoccupés par les atteinte à un symbole qu’à celles à la démocratie. Oui parce que gazer et retenir des manifestants pacifistes (les black blocs n’ont pas agi avant les premiers gazages), j’appelle pas ça de la démocratie, perso…
Vous me croyez pas ? Alors demain (si j’ai le temps, pas garanti), je vous expliquerai que le dénigrement des manifestants de la COP21 est identique au dénigrement des féministes.
Et pour se cultiver un peu plus sur le sujet, une vidéo au poil d’Osons Causer (une chaîne à regarder de près)
3 réflexions sur “Où je ne suis plus dupe – manipulation médiatique”