A mon âme poète

Mon cher moi d’avant,

Hier soir, en rentrant chez moi, je ne sais pourquoi mais un exercice de français m’est revenu tout à coup en tête. C’était en 3e, l’année du brevet. Sur le coup, je sais, ça fait peur mais je te promets que près de 15 ans plus tard (merde, 15 ans, déjà, qu’ai-je donc fait du temps passé ?), tu en riras de bon cœur. Le brevet est une blague, vois ça comme une initiation au futur bac. Mais je ne veux pas te parler d’examens, non, je veux te parler poésie.


Ce fameux exercice, donc. La prof nous avait demandé de faire un poème prenant une forme particulière, un calligramme. Evidemment à ce moment là, tu étais dans ta phase spleenique de cet amour à sens unique que tu nourrissais pour Guillaume (qui est en fait un crétin, je te l’ai déjà dit). Alors tu avais décidé de faire un poème en forme de cœur, paie ton originalité. Et ce que je retiens
de l’anecdote, c’est la malaise face au mot « braise ». Ca donnait un peu « tu m’as envoûtée avec tes yeux de braise… ». Mmmm, qu’est-ce qui rime avec braise ? Falaise ? Fraise ? Je sais que seuls ces deux là m’étaient venus à l’esprit alors que là, j’ai eu malaise de suite, t’as vu ? Question de vocabulaire, peut-être même si dans le contexte, ça ne nous aide pas beaucoup. Et de là, je me suis souvenue de ta prime jeunesse, de la mienne, enfin, tu vois. Du temps où tu/je écrivais des poèmes à longueur de temps où tu trouvais lyrique de faire rimer amour avec toujours (ahah) et je me souviens aussi d’un poème qui commençait par « j’ai posé un chrysanthème d’or /sur la tombe de notre amour mort ». A l’époque, tu trouvais ça brillant. Aujourd’hui, je trouve ça neuneu mais mignon.




J’ai dû écrire une bonne trentaine de poèmes à cette période dont le fameux « blues de l’étude » qui donnait à peu près ça : « c’est le blues de l’étude/je me fais chier comme d’habitude » et y avait aussi un passage du type « Ce que je me fais chier/L’homme de ma vie vient de passer/mon Dieu qu’il est  beau/Il devrait poser pour des photos ». Fin et spirituel, le tout sur une grande copie double (je m’ennuyais vraiment beaucoup, manifestement). Mais j’aimais mieux écrire des poèmes d’amour parce que l’amour c’est beau, c’est universel, blablabla…  Oui, bon, je t’absous, les adolescents sont rarement fut-fut. Et celui qui me traite t’attardée en me parlant de Rimbault (oui, j’ai déjà eu
ça en comm une fois, on rigole, on rigole), je lui aplatis le museau.




Et puis un jour, ça m’a passé, je ne sais plus vraiment quand mais je sais pourquoi : parce que j’ai pris conscience que c’était mauvais, neuneu, plat, sans saveur, tellement vu. Oh, j’aurai tout de même pu faire parolière pour Lorie, Eve Angeli ou les 2B3 (-1). Ah zut, oui, pardon, tu pouvais pas savoir mais un 2B3 va décéder, je te dis pas lequel pour ménager le suspense. Même si, au fond, tu t’en fous, tu n’es jamais tombée amoureuse d’un chanteur de boysband.  Mais ça va, ta sœur a pris ce créneau là donc notre mère a pu se désespérer pour la passion d’une de ses filles pour des chanteurs bodybuildés, huilés.




Alors tu crois que je te dis d’arrêter de suite ton scribouillage poétique ? Non, ma fille, au contraire. Mais ne te prends pas trop au sérieux quand même, je te promets, ce n’est pas ta voix. Mais tu as d’autres cordes à ton arc, ouf !

11 réflexions sur “A mon âme poète

  1. ne pas sous estimer l’effet libératoire de l’acte d’ecriture, que ce soit des poemes, des chansons, des blogs voire des romans pour les plus balaises…y’a pas de mal a vouloir s’exprimer.

  2. Wooaaah… moi aussi j’avais des cahiers A4 entiers remplis de poèmes dédiés à des mecs à qui je n’avais jamais parlé (timidité de la jeune fille oblige)… Faudra que je les déterre de chez mes parents, je pense que ça doit être bien marrant avec le recul. Mais je te trouve plutôt inspirée, le coup des chrysanthèmes c’était pas mal…

  3. c’est marrant, à 15 ans j’étais déjà blasée 😀

    quand les copines disaient « mour toujours, amitié pour l’éternité » je me marrais.

    En y repensant, j’étais plutôt une sale peste 😀

  4. J’adore !!! J’ai aussi retrouvé des poemes écrits au collège ou lycée : c’est d’un niais !! Je comptais justement les publier sur FB un jour où l’atmosphiiiiiiiiire serait pas top histoire de faire souriiiiiiiire la gente del barrio ! Ya vraiment de quoi se marrer ! On a été jeune Nina ! On a vécu !

  5. Heureusement que l’on n’est pas obligé de s’appeler Rimbaud pour écrire des poèmes. Même si c’est niais, l’essentiel est que ce soit écrit avec son coeur (là, je viens d’écrire un vrai lieu commun bien niais !) 😉

  6. Au moins tes écrits adolescents ayant survécu restent j’imagine dans leur cartons, alors qu’avec les skyblogs… Imaginons dans 30, 40 ans des candidats à la présidence épinglés grâce à leurs écrits sur « l’ohème y sont
    tro for » ou bien sur « le bogoss de la 4èD ki roul en skooter ». On a pas fini de se marrer

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