Maria jeta un œil par la fenêtre et soupira. Depuis qu’elle vivait dans cette ville, elle avait rêvé de revoir ce ciel bleu qui lui manquait tant. A présent qu’elle le pouvait, elle
aurait voulu être ailleurs, dans l’ombre, avec Juan. Dans quelques heures, elle allait mourir et elle avait peur. Elle regrettait d’avoir quitté le groupe de rebelles et d’avoir agi sans réfléchir,
ça l’avait amenée directement à sa perte.
Elle s’assit sur le sol humide de la cellule et se recroquevilla sur elle-même pour pleurer, tout en récitant des prières à la Vierge. Auparavant, elle ne s’était jamais rendue compte qu’elle avait
peur de la mort, ça lui semblait si abstrait. Elle était beaucoup trop jeune pour mourir et pourtant, le lendemain soir, elle servirait de spectacle à tous ses élitaires égoïstes et bouffis
d’orgueil. C’était vraiment une fin peu réjouissante ! Avec de la chance, ses bombes allaient quand même exploser, ce qui lui permettrait de se venger à titre posthume. Mais c’était vraiment
une consolation un peu trop maigre à son goût. Elle voulait revoir Juan une dernière fois pour lui dire au revoir, mais si on lui demandait ses dernières volontés, ce qui l’étonnerait beaucoup,
elle ne parlerait pas de son frère. Il serait accusé de faire partie des rebelles et serait condamné à son tour et il en n’était pas question, elle ne pouvait pas livrer son frère. Elle n’avait
même pas donné le nom d’Oceany, d’une part parce qu’elle voulait être la seule martyre, mais aussi parce que la blonde n’attendait que ça et elle lui avait été trop antipathique. Il n’était pas
question de lui donner satisfaction. De toute façon, Oceany n’était absolument pour rien dans cette histoire, la dénoncer aurait été malhonnête et, même si elle avait beaucoup de défauts. Ce
n’était pas son genre de faire porter le chapeau aux autres, elle assumait pleinement ses actes.
Elle écrasa une larme qui lui coulait le long des joues et regarda sa main où se trouvait la goutte d’eau, réfléchissant à un moyen de s’enfuir. Il était encore trop tôt pour baisser les bras, elle
avait encore un faible espoir. Après tout, elle n’était pas encore morte.
Kelly referma soigneusement la porte de la « chambre » du grand patron et s’apprêtait à repartir dans le bureau de son mari. Elle se retrouva nez à nez avec
Bryan, ce qui la fit sursauter, mais elle garda son sang-froid. Bryan ne savait rien du grand patron, c’était tout juste s’il connaissait son existence et c’était déjà bien suffisant.
« Qu’est ce que tu fais ici ? demanda-t-il.
– Je pourrais te poser la même question.
– Je te cherchais. Qu’y a-t-il derrière cette porte ?
– Rien que tu n’as besoin de connaître.
– Tu sembles savoir énormément de choses, alors que moi, j’avance dans le brouillard et je commence à en avoir assez.
– Je n’en sais pas plus que toi.
– Vraiment ? Je suis sûr que tu connais l’identité du grand patron et qu’il n’est pas loin, dans l’immeuble même de la mairie, pour tout contrôler e tu viens juste d’aller le voir. N’est ce
pas ?
– Ca ne te regarde pas, je fais ce que je veux.
– Vraiment ? Tu sais, je pourrais tout raconter à ton cher Bill sur tes activités et sur le grand patron, ça pourrait foutre tes plans en l’air.
– Tu me fais chanter ?
– On peut appeler ça comme ça, oui. »
Elle éclata de rire ce qui mit Bryan mal à l’aise. Il la connaissait, elle allait lui sortir un de ses tours de passe-passe qu’il haïssait et il ne se trompa pas. Elle sortit un petit revolver de
son sac et le pointa sur lui.
« Je te laisse une dernière chance parce que tu es très mignon et que je prends bien mon pied avec toi, mais encore une menace de ce style et je t ‘élimine sans hésiter. C’est moi qui mène la
barque, tu rames ou tu coules, tu choisis.
– OK, c’est bon, répondit-il en avalant difficilement sa salive. Je ne te demanderai plus rien sur notre chef mystérieux.
– C’est mieux comme ça. Bon, viens, il faut qu’on organise l’exécution de ce soir. Il pensait l’écarteler, mais je trouve ça trop…difficile comme spectacle, il y a des enfants et ça pourrait donner
une mauvaise image de nous. Alors je pensais à quelque chose de plus classique mais de très sophistiqué.
– Tu es bien la première personne que je connais qui qualifie une exécution publique de sophistiquée.
– Je n’ai pas demandé ton avis, tu gardes des remarques pour toi. Bon, j’ai pensé qu’on pourrait la guillotiner, ce n’est pas trop affreux mais assez spectaculaire et ça fait très royal ! En
plus, nous avons une très belle guillotine au théâtre, pas besoin de la fabriquer.
– Il y a une guillotine au Théâtre ?
– Oui, c’était un élément de décor, à la base, mais il suffit juste de mettre une vraie lame et le tour est joué. Oh, j’ai vraiment hâte de voir ça et, avec de la chance, la rebelle va nous donner
le nom de son chef au dernier moment. Une double exécution, le pied !
– C’est la double exécution qui t’excite ou la possibilité de te débarrasser d’Oceany ?
– Elle doit payer pour ce qu’elle a osé me faire et je te jure que je vais m’arranger pour qu’elle souffre un maximum.
– Est-ce que tu as envisagé la possibilité qu’elle soit totalement innocente ?
– Elle ne l’est pas et puis, si c’était le cas…elle mourra sur l’autel de la justice, c’est tout.
– Mais bon sang, qu’est-ce qu’elle t’a fait, cette pauvre gosse, pour que tu lui en veuilles à ce point ?
– Elle s’est foutue de nous, elle a voulu nous défier, elle va s’en mordre les doigts ! Bon, si tu allais voir Bill, il a sûrement besoin de toi. Moi, je vais me préparer pour ce soir. »
Elle le planta là et partit en direction de la sortie. Plus ça allait, plus il se sentait mal à l’aise avec elle. Elle était dangereuse et au moindre faux pas, elle n’hésiterait pas à se
débarrasser de lui, idée vraiment peu réjouissante. Pourquoi ne lui faisait-elle donc pas confiance ? Pourquoi refusait-elle de lui révéler l’identité du grand patron ? Ca devait être un élitiste
très connu et très respecté, ça expliquait peut-être son attitude, mais qui ? La plupart étaient trop vieux pour avoir deux idées claires à la suite et les autres n’avaient pas assez de volonté
pour diriger toute cette ville. La réponse se trouvait dans le fichier confidentiel auquel personne n’avait accès à l’exception de Kelly et de son cher patron, mais il allait travailler dessus
activement. S’il découvrait le nom de ce mystérieux dirigeant, il comprendrait peut-être mieux le comportement de sa maîtresse et tous ces secrets autour de lui.
Mais pour le moment, il n’avait pas le temps de s’en occuper, il avait trop à faire avec la réception de fiançailles qui approchait à grands pas.
Oceany se regarda dans son miroir et sourit. Oliver avait beaucoup de goûts pour un petit garçon de 9 ans. Sa robe, d’un joli bleu pastel, était striée de
fils d’argent et lui permettait une assez grande liberté de mouvements grâce à la grande fente sur les côtés, mais surtout, il ne lui avait pas trouvé une affreuse robe meringue qu’elle détestait
et trouvait ridicule. Elle soigna sa coiffure en passant plus d’une heure à se faire de jolies anglaises et se maquilla légèrement, car elle ne comptait pas garder son masque toute la soirée, même
s’il était très joli. Argenté, il s’harmonisait bien avec la robe et présentait un visage rieur, ce qu’elle trouvait charmant. Elle s’assit sur son lit et resta un instant, les yeux dans le vague,
à considérer tout ce que cette soirée représentait pour elle. Elle allait se fiancer avec Marc dans quelques heures et le seul homme auquel elle ne cessait de penser, c’était Ethan. Elle avait hâte
de le revoir, même s’ils ne pourraient pas être seuls durant toute la soirée. Rien qu’être près de lui, ça lui suffisait pour être heureuse.
On frappa la porte et Oliver fit irruption dans la chambre dans sa tenue de lutin et sauta sur le lit, à côté de sa sœur.
« Alors, il te plaît, ton costume ?
– Oui, tu as très bien choisi, je suis fière de toi. Tu sais que tu es très mignon en lutin ? Toutes les filles vont être amoureuses de toi, ce soir.
– Ah non ! Beurk ! Pas les filles ! Elles sont trop gnangnan !
– Gnangnan ? Tu trouves que je suis gnangnan ?
– Non, toi, tu es une grande, c’est pas pareil.
– Tu vas bientôt changer de discours, crois-moi !
– Dis, maman m’a dit que tu allais bientôt partir avec Mark, c’est vrai ? Parce que moi, je veux pas que tu partes !
– On verra, Oliver, on verra. »
Elle embrassa tendrement le front de son frère et le serra contre elle. Avec de la chance, s’ils agissaient tous à temps, elle n’aurait pas à se marier avec Mark, elle pourrait quitter cette
maudite ville et vivre avec ceux qu’elle aimait. Finalement, le bonheur, ce n’était pas le luxe et le faste, c’était juste mener une vie simple avec les siens.
« On ne peut pas y aller armés, on va se faire attraper ! »
Mai leva les yeux au ciel et soupira. Juan ne mettait vraiment aucune bonne volonté dans cette mission et rien ne l’exaspérait plus que celui qui faisait exprès de retarder les choses.
« Voyons, nous avons des invitations et ils sont minuscules, ces revolvers, ils tiennent dans la main ! De toute façon, on aura pas à s’en servir, c’est juste au cas où. On va bien s’amuser, tu vas
voir. J’ai hâte de voir la tête d’Oxford quand notre gâteau va lui exploser à la figure ! Avec les félicitations des rebelles !
– Je la sens mal, cette soirée, il va se passer quelque chose, j’en suis sûr. Je crois qu’on ferait mieux de tout annuler.
– Non, on n’annule rien ! Nous voulons montrer à tous ces élitaires que nous pouvons les atteindre sans problème et qu’ils prennent conscience qu’il y a un problème à Technopolis. Nous devons être
plus convaincant que leur propagande.
– Oui, je sais tout ça, ça fait vingt fois que tu me le répètes, mais je le sens mal quand même, c’est tout. Où sont Myo et Kirstie ?
– Ils se préparent. Tiens, mets-toi ça sur la figure.
– Qu’est ce que c’est que cette pâté blanche ?
– Du maquillage : c’est pour éviter qu’on remarque la couleur de nos peaux un peu trop colorées au goût de cette foutue ville. En plus, les gens ne pourront pas nous différencier et ne verront pas
que nous sommes quatre. »
Il soupira et commença à étaler la crème sur son visage. C’était tout simplement grotesque, mais Mai avait raison : même si les gens ne les détaillaient pas de la tête aux pieds, ils verraient bien
la couleur noire de Kirstie et comprendraient qu’ils étaient tous des rebelles. La jeune Noire arriva d’ailleurs à ce moment-là, vêtue de sa combinaison en latex qui la moulait parfaitement et
mettait en valeur ses formes féminines.
« Je me demande bien pourquoi je viens, commença-t-elle.
– Pour t’amuser avec nous. On va ridiculiser tous ces esclavagistes égocentriques, ça va être très chouette. Tu vas voir, tu vas adorer.
– Je trouve ça inutilement dangereux. Si on se fait attraper, c’est fini et je suis beaucoup plus exposée que vous. Mon masque ne couvre pas tout mon visage et ils vont bien voir que je suis noire,
et mes mains.
– Hop ! Voici des gants pour tes mains et voici de la crème pour ton visage, il sera encore plus blanc que blanc !
– Mai, je crois qu’on fait une erreur.
– Enfin quelqu’un qui est d’accord avec moi ! s’exclama Juan.
– Votre optimisme vous tuera, à tous les deux ! Il va y avoir des centaines de personnes, là-bas, comment pourront-ils nous reconnaître, c’est tout simplement impossible !
– Et tu n’as pas peur qu’ils fouillent la salle pour vérifier qu’il n’y a pas de rebelles quand le gâteau va exploser ? Si j’étais Oxford, c’est ce que je ferais.
– Et ton fils aura une superbe fin de fiançailles : une fouille en règle de chaque invité ! Je ne crois pas que ce cher Bill veuille gâcher la fête de son fils.
– Oxford n’aime qu’une seule personne, à savoir, lui, intervint Kirstie. A mon avis, sa blessure d’amour propre sera plus forte que son amour paternel, j’en suis sûre.
– D’accord, on va préparer un plan de repli ! On va garer les motos sous les fenêtres du théâtre, comme ça, en cas de coup dur, on file. De toute façon, arrêtez de vous inquiéter, tout se passera
bien, j’en suis sûre. Et en cas de pépin, Oceany et Ethan pourront nous aider, alors relax. Bon, où est Myo ?
– Je suis là, mon trésor ! fit-il en apparaissant costumé et maquillé. Je te plais ?
– Et bien…arrête le maquillage, ça te va vraiment pas.
– Oh ! Femme cruelle qui me brise le cœur ! Bon, je vois que tout le monde est prêt, on va pouvoir partir. Parfait, pile dans les temps. Bon, Juan, tu pars avec Kirstie, moi, je voyage avec ma
charmante épouse.
– D’accord.
– Ca va aller, Juan ! dit Mai. Relaxe-toi, je sens que tout va bien se passer. Intuition féminine.
– Espérons que tu as un bon feeling. »
Preeeeeeeeeum’s !!!
La question existentielle du jour : Oliver va-t-il virer pédé ? Nan parce que si déjà à son âge il aime pas les filles…
Liaisons foireuses?! Non sincèrement j’ai aodré ce blog, félicitations. Franchement bonne continuation car ca en vaut la peine !