Vu que Tatiana a un peu ouvert le débat hier, je poursuis aujourd’hui avec un article qui me trottait dans la tête depuis trois semaines, à savoir la volonté parfois trop manifeste de montrer à certains que, non, non, nous ne sommes pas homophobes.
Il y a trois semaines, mes parents sont montés sur Paris, on se retrouve donc tous les quatre, les parents, Alice et moi, sans Anthony qui était à la caserne, mon presque-frère Yoann et sa copine à qui j’avais donné un pseudo je crois mais j’ai oublié donc on va l’appeler Blanche. Le samedi soir doivent nous rejoindre Thibault, mon jeune cousin qui vient de s’installer sur Paris et… Théo son mec. L’homosexualité de mon cousin n’est pas une nouveauté, on le sait depuis qu’il a 15 ans, on connaît tous Théo mais voilà, on sent comme un flottement… Quand la famille Bartoldi arrive au restaurant, en avance, Thibault et Théo ne sont pas là. On va à notre table de 8, une table rectangulaire et là, au lieu de s’installer les ensemble, mes parents décident de laisser une place vide entre eux et nous pour y placer le couple « pour pas qu’ils se sentent exclus »; Sympa mais j’ai trouvé ça tellement pas naturel de laisser ces deux places en plein milieu que je me suis dit que niveau intégration, on repassera.
Parfois, notre volonté de bien faire amène à une situation grotesque qui peut mettre les gens mal à l’aise. Je me souviens de la fois où j’étais allée prendre un verre entre amis. Dans le lot, mon ex (depuis pas très longtemps) et sa nouvelle copine. Dans une volonté de montrer que je n’étais pas hostile à la nouvelle arrivée, j’en ai fait des caisses, essayant de l’intégrer tant que faire au groupe en lui posant plein de questions… Trèèèèèèèès naturel, tout ça. Pourquoi essaie-t-on de prouver à tout prix notre largeur d’esprit, tenter de
prouver par notre comportement que « mais non, ça ne me gêne pas du tout » alors que notre gentillesse et notre amabilité poussées à l’extrême montre bien que même si ça ne nous gêne pas, on n’est pas super à l’aise, on a peur d’être maladroits.
D’un autre côté, on peut avoir peur de passer pour quelqu’un d’indifférent. Quand j’étais en maîtrise science po, j’avais comme copine Amina, voilée. Bon, sur le coup, j’avais pas super fait gaffe, je croyais que c’était une sorte de turban mais non, Amina était voilée. Et la seule fois où j’ai abordé le sujet avec elle, c’est quand elle a arrêté de le mettre l’année suivant pour se couvrir avec des bandanas. « Tu sais, si je continue de le porter, ça va me freiner dans ma carrière donc je l’ai enlevé ». Des gens m’ont demandé pourquoi je ne lui en avais pas parlé avant mais je n’en voyais pas l’intérêt. Autant lui demander pourquoi elle est musulmane, tiens. Vu que le sujet religion n’est jamais venu sur le tapis, je n’ai pas cherché à savoir.
Des fois, je me dis que le politiquement correct nous bouffe un peu et dicte des comportements que nous ne devrions pas avoir. Si Thibault avec été en couple avec Théa, personne n’aurait eu l’idée de laisser deux places en plein milieu de la table. Parce que tu comprends, on n’est pas homophobes, on veut le leur montrer. Pour moi, ne pas être homophobe, c’est traiter les gens comme n’importe qui, sans commenter leur choix sexuels ni rien. Souvent, on se sent même obligé de préciser « tu vois, Jean-Louis, mon copain pédé… », « et alors Léonard, mon ami juif… ». Si dans certains cas, la précision peut être utile si le fait qu’il soit gay ou juif ait une incidence, la plupart du temps, on a l’impression que c’est une façon pas du tout subtile de faire remarquer que hé! je suis super tolérant. Hé, tu ne trouves pas bizarre de préciser que t’as des amis juifs ou gays alors que ça n’a aucun rapport avec la
conversation ? Parce que moi, si.
Au fond, je me dis que le jour où le fait qu’on soit homo, hétéro, athée, chrétien, musulman, gros, maigre, noir, blanc… Bref que toutes ces données n’auront aucune espèce d’importance, ce jour là, la guerre contre toute forme de discrimination sera gagnée. Mais sincèrement, je n’y crois pas une seconde. Sans doute car nous sommes trop habitués à cataloguer les gens, à les faire rentrer dans des cases. On est définis par notre sexualité, religion, couleur de peau, de cheveux, silhouette, profession, niveau d’étude, logement, nombre d’enfants… Mais si déjà, on pouvait éviter de commenter ces états de fait, ce serait peut-être un petit plus.
NB : J’adore la pub ci dessus.
La situation que tu as décrite avec tes parents c’est tout à fait mon père dès qu’on aborde l’homosexualité.
Maladroit à souhait et pas naturel pour un sou.
C’est chiant à la longue.
je le trouve très bien ce message, tellement que je n’ai rien à ajouter.
« Hé, tu ne trouves pas bizarre de préciser que t’as des amis juifs ou gays alors que ça n’a aucun rapport avec la conversation ? Parce que moi, si. »
J’adore cet article Nina !!! Merci bouuuuucou !!!
C’est une réalité qui moi aussi me laisse perplexe et me fait frissonner ! Tu connais mon franc parler… A chaque fois je dis « Mais quess qu’on en a foutre qu’il soit gay ou juif ou qu’il aime bien manger des canelloni au gruyère ? » Et là j’ai droit à chaque fois à un sourire géné…
Ca me fait penser à une nouvelle superbe d’anticipation :
Cet état de « non-discrimination » (qui était plus lié à la beauté dans cette histoire) était atteint médicalement. En prenant une pillule régulièrement, on pouvait déconnecter une zone du cerveau qui gérait ce jugement sur l’apparence, et on ne pouvait reconnaitre que les caractéristiques morales et intellectuelles des gens ! Dans cette histoire, ce traitement (obligatoire dans certaines universités) était combattu par les sociétés cosmétiques ^^
Ca fait du bien de lire ça après certains articles d’autres vingtenaires prônant l’intolérance.
Pour en revenir à l’article, c’est vrai que quelques fois on en fait trop mais ces maladresses sont plus touchantes que blessantes finalement je pense.
oui mais je vais me permettre de faire mon chieur, n’est il pas un peu sain parfois de se révolter contre le coté totalitaire que peux revêtir le politiquement correct? moi je félicite Lucas de dire ce qu’il pense dans un petit billet satirique, ça me plait bien plus que de dire amen à tout sous prétexte qu’il faut être tolérant.
la tolérance n’est pas un dogme.
Désolé Nina, je me permet de marcher sur tes plates bandes parce que l’attaque me concerne.
Je ne suis pas aussi integriste que ça. C’est simplement que le monde serait plus zen si les instances religieuses ne voulaient pas à tout prix conserver leur main mise sur l’intellect des
peuples. Donc oui, je suis intolérant car je dis FUCK au prosélytisme. Et je le vis trrrrrrès bien (maintenant, Chloé, tu as le droit de dire que je fais du prosélytisme à l’envers mais dans ce cas, déplaçons ce débat sur la rubrique commentaires de mon article car Nina n’a pas à supporter les frais de cette discussion. Merci.)
Il n’y a pas que toi et si je n’ai pas mis de commentaire sur ton article c’est que j’ai jugé cela inutile.
bien sur que ce n’est pas une maladie ou une tare, mais parfois cela peut s’ériger en système totalitaire. si au nom de la tolérance je ne peux pas m’insurger contre la connerie, jugée par moi bien sur, d’un système de pensée, alors c’est liberticide. en clair il ne faut juste pas que cela annhile toute formée de pensée. la contradiction ça a du bon, et comme disait Jean Eustache par le truchement de Jean Pierre Léaud la contradiction devrait être inscrite dans la déclaration des droits de l’homme, ça et le droit de se tirer également.
Généralement les chantres du politiquement correct masquent à travers leurs combats bien souvent le contraire de ce qu’ils défendent. Les exemples sont nombreux : un certain antiracisme d’une partie de la gauche qui tend perfois vers l’antisémitisme ou bien encore certains mouvements minoritaires anticolonisation qui frolent parfois avec le racisme anti-blancs. De toute évidence le monde d’aujourd’hui n’a pas encore totalement réussi à se défaire du dogmatisme et du sectarisme qui ravagea le monde d’hier.
Cela dit pour être un peu plus optimiste que toi peut-être, je trouve que concernant certains combats (place de la femme dans la société, lutte contre contre l’homophobie etc.) notre société a fait beaucoup de progrès ces dernières décennies.
Certes il reste encore à faire pour se sentir totalement « libre » des schémas de pensée éculés, mais comparé à d’autres région du globe, nous ne sommes pas si mauvais.
Merci Nina pour cet article, je crois que je t’aime 🙂
Par contre, quand je parle de toi à ma maman en te présentant comme ‘tu sais maman, Nina, mon amie trop intelligente’, tu crois que je te rentre dans une case et que c’est de l’intolérance ? :/
ce que tu décris s’apparente à de la discrimination positive, et dans la plupart des cas les personnes concernées n’en sortent pas gagnantes
Genre t’en es pas capable ! (je fais de la lèche, ouais, comme ça je pourrai te demander des trucs ensuite et rien ne me sera refusé gnark gnark).
Non, le pire c’est que c’est vrai en plus 🙂