Ressort classique de romans SF, le voyage dans le temps qui sous-tend toujours la terrible question philosophique : faut-il intervenir dans l’histoire ou laisser faire les choses ? Car l’hypothèse de base est simple : un élément modifié dans le passé peut bouleverser tout l’avenir, cf Le voyageur imprudent de Barjavel qui met notamment en scène une sorte de boucle temporelle : s’il fait ça, il se déclenchera ça qui fait que dans son présent, il ne pourra pas repartir dans le passé donc s’il ne repart pas, il ne se passe plus rien donc dans le présent, il peut à nouveau repartir vers le passé pour commettre cet acte et donc ne plus le réaliser dans son présent et repartir dans le passé… Pour simplifier la donne, certains solutionnent tout par un « chaque intervention dans le passé crée une réalité alternative ». Complexe de Terminator : si Sarah et John parviennent à arrêter Skynet, John ne pourra pas envoyer son propre père dans le passé pour qu’il fertilise sa mère. J’ai revu Terminator 1 récemment, j’avoue que je me serais bien laissée planter un John dans le ventre aussi, il est canon son père.
Hypothèse chérie des voyages dans le temps : si tu peux retourner en Allemagne dans les années 20, tu croises Hitler. Tu le tues ou pas ? Si on le tue, on sauve des millions de vie. Forcément, c’est tentant d’être le sauveur de l’humanité même si on reste dans l’anonymat car assassiner un étudiant n’a jamais fait de nous un héros, sauf à connaître l’Histoire qui n’aura du coup jamais lieu. Bon, évidemment, tuer Hitler n’empêchera pas l’affrontement Japon- Etats-Unis. Ok. Mais même en tuant Hitler, les Juifs ne sont plus victimes donc plus d’Israël et plus de guerre là-bas et un gros point de tension en moins dans les relations entre les pays Occidentaux et les pays musulmans et on peut même imaginer que du coup, y aurait pas la guerre froide, pas de guerre en Afghanistan ou de décolonisation donc peut-être pas d’Al Qaïda. Bon, faudrait que je détaille plus, tout ça n’est qu’une simplissime chute de dominos envisageable. Pourtant, je pense que si je retournais dans le passé, je ne tuerai pas Hitler. Bon d’abord parce que je suis pas certaine d’être capable de tuer mais surtout parce que je pense que la chute de domino ne serait pas du tout celle à laquelle on pourrait s’attendre.
Imaginons que je sois moins chochotte et que je tue Hitler. Fin du nazisme qui n’a même pas existé. Bien. Mais n’oublions pas qu’Hitler a quand même pu en arriver là grâce au contexte. Tuer Hitler n’efface pas les conséquences de la Première Guerre Mondiale, le fameux Diktat du traité de Versailles. Ce n’est pas parce qu’Hitler n’existe pas que les Allemands n’ont plus de rancoeur face à la terrible humiliation qu’on leur a imposé, que la crise de 29 n’aura ensuite pas lieu : Hitler était peut-être la mèche mais le mélange explosif est toujours là et rien n’indique qu’une autre mèche ne va pas s’imposer. Sans mauvais jeu de mot capillaire. On pourrait penser à Himmler, par exemple, on l’a pas tué, lui. Alors quoi, on éradique tous les dignitaires du parti pour être sûrs ? Mouais. Le terreau est quand même particulièrement fertile à ce moment de l’histoire, Mussolini n’a pas eu besoin d’Hitler pour arriver au pouvoir. Même si le fascisme n’est pas le nazisme. De la même façon, le début du XXe siècle fait la part belle à l’antisémitisme en France.
Mais ok, imaginons que couic Hitler et qu’aucune mèche ne vient le remplacer à ce moment là de l’Histoire. On peut facilement imaginer que même sans cette guerre, la science continue son chemin. Même si, allez, on peut remettre en question l’installation d’Einstein aux Etats-Unis (même si lors de l’arrivée du nazisme en Allemagne, il n’y résidait pas mais les événements l’ont encouragé à ne pas y retourner)et sa participation au projet Manhattan donc pas de bombe A. Ok. Posons cela. On peut même poser comme hypothèse que sans camp de concentration, pas de tests sur les prisonniers donc un gros recul de la connaissance scientifique par rapport à notre réalité. Sauf que même sans ça, je ne crois pas que les scientifiques se tournent les pouces dans cette réalité alternative.
Or imaginons qu’il n’y ait pas eu d’Hitler, pas de camps, pas de notion de crime contre l’humanité. Inévitablement, un jour ou l’autre, un autre homme serait parvenu à un même comportement. Les camps existaient avant (même s’ils n’étaient pas d’extermination), ils ont continué d’exister ensuite. Donc suivant mon raisonnement : science qui a progressé, tendance « naturelle » de l’Humain à enfermer les ennemis dans des camps, tentation de les éliminer, ça nous fait, ça nous fait… un massacre épouvantable. Sans parler du développement des armes massives. Pendant la guerre froide, si Etats-Unis et Russie ne se sont jamais affrontés directement, c’est parce qu’ils savaient les dégâts provoqués par les bombes A et H. Or vu la surface des deux pays en question, une attaque engendrerait forcément réplique. Et là, prions pour notre survie mais j’ai un peu des doutes. Un peu comme dans Le diable l’emporte de Barjavel. Je sais, je
lis beaucoup trop de Barjavel.
Tout ça pour dire que je ne suis pas convaincue du bienfait pour l’humanité de tuer Hitler, si on pouvait. Je crois que les vies que l’on sauverait au moment de la 2nde guerre mondiale seraient multipliés par 2, 3, 5 ou 10 plus tard dans l’Histoire.
Mais en fait, je trouve fascinant de se pencher sur la question. Je suis preneuse de tous les avis et de toutes les théories. C’est ça qui est magique avec une hypothèse de départ impossible (pour l’heure mais je suis plus que sceptique pour ma part) à mettre en place, c’est qu’on peut imaginer toutes les chutes de Domino possibles et imaginables.
Je dois avouer que ta « théorie » est des plus intéressantes. D’emblée à une telle question « Si tu pouvais voyager dans le temps, t’irais tuer Hitler ? », ma réponse sera oui. Mais en y réfléchissant, j’en viens à la même conclusion que toi. Il n’a été que la mèche (bien allumée) qui s’est présentée au bon moment, mais pour qu’autant de personnes l’aient suivies dans sa « folie », c’est qu’il a parlé en leur nom donc. Le tuer serait en quelque sorte reculer pour mieux sauter.
peut être faudrait-il remonter plus haut et faire en sorte que cette rancoeur allemande n’ai pas lieu d’être, qu’on ne les humilient pas …
seulement ce serait négliger le sentiment d’humiliation que les français ressentaient avant la première guerre mondiale, suite à la défaite de Sedan …
en gros, il faudrait déterminer qui de la poule ou de l’oeuf était là en premier ^^
Je te conseille les nombreuses uchronies sur le sujet ! (surtout « La Part de l’Autre » mm si ce n’est pas à proprement parler la mort d’Hitler)
Enzo => J’ai adoré « la Part de l’autre » ! Il est vraiment bien écrit ce bouquin !
Aaaaah la question « et si »… Toute considération philosophique mise à part, je te conseille le visionnage du film « le dernier souper ». Petit film mineur mais très divertissant où une bande de jeunes étudiants tuent par accident un sale raciste agressif et antisémite qui menaçait de tuer l’un d’entre eux. Une fois cet acte accompli, ils en viennent à se poser la même question que toi et à se sentir investis d’une forme de « mission » à l’égard des salauds ordinaires dont ils estiment que le monde se porterait mieux sans eux. Mais qui est la Bête au fond? 😉
Je ne sais pas si le jeu « Alerte rouge » t’a inspiré cet article, mais son scénario se base exactement sur ce sujet : Einstein invente la machine à remonter le temps et s’en sert pour aller tuer Hitler. Mais c’est Staline qui devient le grand méchant de l’histoire et la guerre froide ne reste pas froide du tout….
Pour ma part, je pense que les évènements historiques, bon ou mauvais, nous servent à apprendre et à évoluer.
Pour rejoindre le commentaire de Yann, si tu choisi de tuer Hitler, tu vas avoir une liste longue comme le bras de personnes à tuer pour leurs futurs actes tout aussi cruels… Et une autre personne te considèrera alors comme le monstre que tu cherches justement à éliminer…
Et sans Hitler, point de point Godwin… 🙂
C’est vrai que ce sont des questionnements vraiment fascinants, et c’est assez « amusant » d’imaginer toutes ces alternatives…Dommage que le voyage dans le temps reste impossible, et il y a un truc tout simple qui le « prouve » : si le voyage dans le temps était possible, on serait « envahis » par les touristes du futur..
Je pense que tu réponds toi-même à la question : on sait ce qu’on tue, on ne sait pas par quoi il aurait été remplacé…
D’ailleurs, Hitler est peut-être le remplaçant d’un autre dictateur qu’un voyageur du temps a éliminé, en vue de nous en débarrasser =O
Reflexion sur un « détail » qui me chaoque dans votre article :
« sans camp de concentration, pas de tests sur les prisonniers donc un gros recul de la connaissance scientifique par rapport à notre réalité »
je sais bien que l’histoire (et son enseignemeent) n’est que falsification, mais j’avais appris que les expérimentation en camp de concentration n’avait pas servi à grand’chose.
Un post qui part de Barjavel pour alimenter sa réflexion, ça donne un article bien plus intéressant que ceux qui partent de la télé réalité :p
Alors, dans la science fiction au sens large du terme, il y a quand même le mot science. Et le voyage dans le temps, s’il n’est théoriquement pas impossible, peut être envisagé de deux manières :
Le voyage dans le temps purement fantastique (remonter le temps) ce qui n’a aucun sens, puisque le temps et l’espace étant lié, le voyage dans le temps est relatif, et ne peux pas se concevoir sans déplacement, et ne permet ainsi pas de revenir avant son point de départ.
Et le voyage dans le temps avec une approche plus scientifique, ou dans un futur lointain, ayant appris à de déplacer plus vite que la lumière, on a des gens partis loin qui reviennent décalés par rapport à notre référentiel temps. (le temps écoulé n’est pas le même pour les gens, et on a des gens partis à 20 ans qui reviennent à 25 alors que il s’est écoulé 10 ans sur Terre).
Donc aller tuer Hitler, no way, mais imaginons, la réponse est évidement non. Cf l’effet papillon ou retour vers le futur, tu modifies un petit truc de rien tu peux tout changer, alors un truc aussi énorme, tu viens simplement d’effacer le monde que tu connais, et à supposer que tu puisses revenir dans le référentiel temps (la date donc) identique à celui où tu es parti, tu ne reconnaitrais pas le monde dans lequel tu vies, tu n’y aurais probablement pas le même toit, les mêmes amis, la même vie, voire tu n’existerais tout simplement pas, tes parents étant de la génération baby boom qui n’a forcément pas lieu de la même façon sans 2ème guerre mondiale.
En revanche en terme de matière à réflexion, les romans d’anticipation sont un bon terreau, Dune par exemple, en particulier à partir de l’empereur dieu.
Des milliards de Tapis de Cheveux.
Hypérion
Les guerriers du Silence
pour n’en citer que quelques uns.
En outre, si tu retournais dans le temps et tuais Hitler étudiant, tu modifierais profondément le destin global de l’Europe et du monde entier et donc des myriades de destins individuels dont ceux de tes (arrières-)grands-parents… au point même d’empêcher les causalités menant à la rencontre entre ton Arrière-Grand-Papy et ton Arrière-Grand-Mamy. Consécutivement, ta naissance n’aurait pas eu lieu et tu n’aurais de toute façon pas pu remonter le temps.
Pour autant, j’adore la SF qui traite du voyage dans le temps, notamment la guerre des Terminator qui se joue dans des lignes de temps passés et futurs.
Cordialement
On ne lit JAMAIS trop de Barjavel !
Profonde réflexion que tu as réussi à expliciter de manière claire : Chapeau bas!
Je pense aussi que la mort du dictateur n’aurait pas enrayer les désastres du XX° siècle.
Et même si la guerre 39-45 n’avait pas eu lieu, il n’y aurait jamais eu d’accord franco-allemand, donc pas d’Europe, ni de zone euro et toussa… Pour le meilleur ou pour le pire? Ca je n’en sais rien.
De même, de Gaulle aurait-il été de Gaulle? L’Algérie aurait elle gagné son indépendance?
Tout ça me perturbe dès que j’y pense…
Intéressant en effet…
On ne sait pas ce qu’il serait advenu si Hitler n’avait pas été là…Changer l’Histoire est trop lourd en conséquences totalement imprévisibles: le risque est énorme!
Maintenant, pourquoi tuer? Je veux bien qu’Hitler mérite la mort mais quand il était étudiant, ce n’était pas forcément le cas…Pour changer l’histoire sans se salir(directement) les mains, il aurait suffit de s’arranger pour qu’Hitler soit accepté dans son école de peinture>Il devient un peintre parmi d’autres, n’est pas frustré, ne s’engage pas en politique > Tout le monde est content et le dossier est clos 🙂
A vrai dire…le problème, le vrai…ne venait pas vraiment d’Hitler! Certes, il était très atteint, très entouré également (il ne faut pas oublier qu’il ne serait arrivé à rien s’il n’était pas épaulé..)..il vient du fait que personne n’ait pu s’interposer et ait réussi à l’arrêter! Peintre, à la base quand même heun..c’est lorsqu’on dénigre son travail qu’Hitler s’engage dans l’armée, se bat, devient chancelier…et vous connaissez la suite! La vraie question, pour moi, serait: comment se fait-il qu’un artiste (qui par définition est censé être ouvert d’esprit) en soit arrivé à là? o_O
si je devais remonter le temps jusqu’à Hitler est-ce que je le tuerais et bien pas du tout je dirais même que je l’aiderai a 100% sa éviterai toute ces personne profitent du système français et il y aurai que des pur souche donc vive Hitler
Quitte à troller, révise tes cours d’histoire. Non parce que faut être un peu crédible si tu veux des réactions outrées. Là, tu fais juste rigoler.
La question est plutôt, maintenant que tu es dans le présent, que fais-tu pour rendre la vie meilleur, en agissant régulièrement et avec conviction.
Mon seul terrain d’action est le présent. Ma vie est ma propre responsabilté. C’est ce que je fais de mon présent en vue du futur qui compte.