Apprendre à vider le vase

Hier soir, j’ai comaté devant des épisodes de série sur mon ordinateur. En fait, depuis le déménagement, j’ai une vie trop géniale : le soir, je rentre, je lance des séries sur mon pc, je dors sur mon canapé (j’ai pas encore reçu mon lit, je vous raconterai cette histoire plus tard)… Une vraie no life. Et hier soir, je me mets la saison 5 de Six Feet Under, les derniers épisodes. Je ne vais pas trop raconter pour ceux qui n’ont pas vu mais comme on peut s’y attendre, un des personnages principaux meurt. Et pendant l’épisode de son enterrement, comme une conne, j’ai pleuré, un peu. Et franchement, ça fait du bien.

Depuis quelques temps, je cumule les petites tracasseries et vexations en tout genre. Déjà, y a eu le déménagement, légèrement usant pour les nerfs et encore, tout s’est bien passé. Mais bon, le vase se remplit, tout doucement, imperceptiblement et là, je commence à frémir. Quand arrivera la goutte d’eau en trop ? Parce que parfois, y a des endroits où pleurer est plus qu’inconvenant… Genre au bureau. Ou alors faut être juste à côté des toilettes pour avoir le temps de se cacher pour pleurer.


Il y a quelques jours, un peu avant le déménagement, je crois, je flirtais avec la grosse fatigue, un peu un ras le bol général doublé du stress du « j’aurais jamais fini mes cartons à temps » (ai-je finalement réussi ? Teasing !). En gros, rien de trop grave pour pleurer mais une envie de vider le vase quand même. D’abord, pleurer un bon coup, ça fait mieux dormir ensuite. Mais voilà, comme je suis du genre « je suis forte, rien ne me touche », je suis plus du genre à bloquer mes larmes qu’à les provoquer.

D’ailleurs, pleurer n’est pas à la mode. On a bien les cours de rire ou en gros, on se met en cercle et on se bidonne pour se détendre. Ouais mais pourquoi personne ne fait pareil pour pleurer ? Un peu comme les saignées dans le temps pour vider les mauvaises humeurs mais en moins violent ? Non, pleurer, c’est le mal, c’est le malheur, on ne pleure pas. Pourtant, des fois, ça ferait du bien. Sans attendre un vrai malheur, juste pour vider le vase. Non mais c’est vrai, faut jamais pleurer, pleurer, c’est la faiblesse, le mal, gna gna gna et résultat, on bloque, on bloque, et on finit par pleurer parce qu’on a cassé son mug.

Quand j’étais en maîtrise de science po, on avait un cours de philosophie moderne et le prof nous parlait de Rousseau : « Et alors, là, Rousseau raconte qu’il a eu une espèce de révélation, il s’est assis sur un rocher et il s’est mis à pleurer. Oui, au XVIIIe siècle, on pleurait beaucoup ». D’ailleurs, le prof ressort cette phrase tous les ans. Et là, je me dis que les Lumières n’ont pas usurpé leur nom. Le XXe et à priori le XXIe sont trop des siècles de contrôle des émotions. Il ne faut pas pleurer en public, pas rire trop fort (enfin, c’est vrai que certains ont des gloussements insupportables), pas dévoiler ses sentiments amoureux pour ne pas effrayer l’autre, pas trop étaler son bonheur, son malheur, et blablabla. Sois neutre et indifférent, merci. Et bien, je trouve ça triste. Y a 15 jours, ma sœur m’a appelée en larmes car une de ses meilleures amies venait d’accoucher et elle était très heureuse
« Bouhouhou, j’arrive pas à m’arrêter !!

– Ben, profite, pleure un bon coup, pour une fois que c’est une bonne raison de pleurer ! ».

Bref, je me demande si on ne gagnerait pas à revenir à plus de sensibilité, à arrêter de se la jouer surhommes alors que nous ne sommes pas des robots. Quand le vase est plein, il faut le vider. Tout le monde pleure mais certains se cachent juste mieux que d’autre.

16 réflexions sur “Apprendre à vider le vase

  1. j’ai adoré ce message et j’aurais envie d’écrire un tas de lignes pour aller dans ton sens, mais je crois que je vais garder tout ça et en faire un blog ce soir, ça te forcera à y venir pour le lire et peut être même, qui sait, réagir. en tout cas je suis à fond avec tout.

  2. Ah ! Quelle coïncidence cet article. J’ai fait mon bisounours hier en explosant en sanglots dans mes escaliers en rentrant chez moi car je venais tout juste de réussir ma défense de mémoire. Et ça fait un bien énorme. Y a pas à dire, une petite session lacrymale de temps en temps c’est efficace et surtout humain.

    1. Hélas, j’encaisse depuis le début de l’été, je n’attends que l’abandon des pleurs lorsque mon examen sera enfin réussi. J’ai hâte d’y être, la pression devient forte, alors même que je trouve ça absurde. Manifestement, l’organisme suit son chemin indépendamment des explications qu’on se fait.

      1. Oui, je connais ça. Parfois, je me dis que j’ai BESOIN de pleurer mais ça reste coincée dans la gorge, j’ai BESOIN de ce soulagement mais ça ne sort pas. Parfois, j’ai l’impression que pleurer me nettoierait de l’intérieur. C’est pas que j’ai de bonnes raisons de pleurer mais ça ferait du bien. Je crois que je dois encore travailler sur la question

  3. Nina,

    tu as raison! Mais aujourd’hui , on montre ses (peut-être fausses) emotions apparemment surtout dans des télé-reality shows…

    Moi, j’en ai marre de cette année 2008 je cumule depuis le début d’année tellement des petites et moyennes tracasseries (qui certes ne m’ont pas tué) que j’ai parfois aussi envie de pleurer un peu… Je ne suis pas non plus un surhommes ou robot. Ou au moins quelqu’un(e) pour se prendre simplement dans les bras…

    Enfin, ce triste mois de novembre est bientôt fini et 2009 sera certainement melieur que 2008…

    Courage!

  4. Moi je pleure tout le temps…mais chez moi…mais franchement je pleure super facilement et effectivement je me retiens pas ça relâche les nerfs…je pleure quand je vois un truc heureux, quand je vois un truc triste…je suis pas difficile! 🙂

    Par contre rare sont mes amis qui m’ont vu pleurer! 🙂

  5. Il est évident qu’auparavant on pleurait beaucoup plus : il suffit de lire des livres écrits au XVIIIe et avant, ça pleure tout le temps, à la moindre émotion, de joie ou de malheur. Ca fait toujours bizarre, on se dit « mais enfin, ils pleurent vraiment pour un rien ». Alors qu’aujourd’hui, pleurer peut-être vu comme un aveu de faiblesse, un échec. Pourtant, ça fait du bien. Il m’arrive parfois de lâcher une larme, juste une ou deux, quand j’ai un trop plein d’émotions, et tout de suite ça va mieux …

  6. et voui, malheureuse équation actuelle qui dit:
    pleurs=émotions=faiblesse=looser
    Dans une époque où on voit fleurir tout un tas de bouquins genre « comment être un winner » « comment parvenir au controle de soi » et je ne parle meme pas du nvo métier à la mode: coach personnel, pour être au top de soi même! (wou ou), des petits messages comme le tien, ça fait du bien. Marchi

  7. d’ailleurs pour le message que j’ai écrit inspiré par le tien j’ai reçu un superbe commentaire qui me traitait aimablement de tapette. l’originalité des anonymes est grandiose.

  8. ouais et c’est tout ce que j’ai d’ailleurs, à défaut de lecteurs snif. hors de blagues je pense que ça doit être un pote qui se moque, ça n’a pas insisté.

  9. Tu m’étonnes…j’y pense encore 2 ans après !
    C’est beau. La vie résumée en 40 minutes. Qui dit mieux ? 🙂
    Bon, ok, je m’emballe peut-être un chouia. Mais juste un chouia alors.

  10. C’est triste, mais en même temps je trouve ce passage étrangement apaisant. On pleure, certes, mais cette vie qui se propage dans d’autres et qui crée des petites vagues dans les vies des autres, c’est aussi réjouissant.

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