Par Diane
Le temps ne fait rien à l’affaire, parait-il. Eh bah en ce moment, il ne fait pas vraiment les miennes. Je vais vous faire un aveu, chers lecteurs/trices, et pardonnez moi à l’avance d’afficher et d’étaler ainsi mes pensées les plus secrètes et les revers les plus intimes de ma petite personne avec une telle impudeur, mais il faut bien se résoudre à affronter ses démons intérieurs, fut-ce par une séance de thérapie collective dont vous êtes les heureux bénéficiaires, consentants ou non. Alors oui, avouons le, jetons nous dans l’eau de vie de la mare qu’elle a tué la peau de l’ours avant les boeufs de la charrue: je vieillis.
Il faut bien se résoudre à la tragique et inéluctacle évidence, je suis dorénavant plus proche de mes trente ans que de mes vingt, même si c’est un scandale absolu, le lent processus de mon flétrissement progressif est entamé, mes cellules dégénèrent, je vais inéluctablement perdre mes dents, mes cheveux, et quelques centimètres que déja j’en ai pas beaucoup, la frétillante énergie de
mes vingt ans va petit à petit me quitter sans que je puisse abolument rien faire puisqu’avec le temps va tout s’en va même les plus chouettes souvenirs ça taille une de ces gueules, et je vais rester là, comme une pauvre petite huitre passive accrochée à son rocher, vieux lui aussi, à compter les secondes passer, de plus en plus vite, et à trembler de désespoir, avec sur le dos le poids croissant des minutes et dans le coeur l’angoisse moite du temps qui passe, en levant les yeux vers cette immuable vérité qui s’élève devant moi, énorme et impassible: JE POURRIS!!!!
Alors là je vous vois venir: « oui bon ok d’accord Diane, mais bon, jte ferais signale que techniquement t’as commencé à vieillir depuis le jour de ta naissance, hein, alors, why now? » Eh bien, déja, laissez moi vous féliciter pour la pertinence de votre question à laquelle je vais derechef m’efforcer de répondre. Il se trouve que récemment me sont arrivés deux épisodes particulièrement révélateurs, dont je vais re-derechef vous narrer le déroulement.
1/Je suis l’heureuse tata d’une petite nièce de 4 ans d’une originalité certaine et criante, puisqu’elle divise son temps entre appeler tous ses proches caca boudin prout, et s’intéresser à Dora l’exploratrice ainsi qu’à tout ce qui ressemble de près ou de loin à une princesse.
L’autre jour, nous regardions ensemble un épisode de Dora l’exploratrice, et il se trouve que, au lieu, comme le faisait ma nièce, de m’émerveiller du magnifique jardin dans lequel Dora et ses amis pénétraient, de me sentir triste quand son pote Babouche le singe mange un fruit dans un arbre et tombe raide dans le coma, et de m’émouvoir quand Dora apprivoise le méchant dragon en lui retirant
une épine de la patte, je fis remarquer à ma nièce quelque peu dubitative que son truc là, c’était rien que de la propagande biblique.
Devant ce scandale avéré, nous nous rebattons sur les bons vieux classiques, et optons pour un visionnage de Cendrillon. Et voilà t’y pas que mon esprit semi-pourri se met à penser que bon c’est bien gentil tout ça hein, mais le prince, s’il avait vu cendrillon dans ses habits de tous les jours, en vieux tablier en train de récurer les chiottes, eh bah il l’aurait même pas remarquée. Et pis c’est à peine s’il lui adresse un mot, et pouf il est amoureux de la blonde aux gros nichons. C’est pas comme si elle avait un cerveau hein, non plus, et la communion des esprits, et les passionnantes conversations sur les métamorphoses des citrouilles jusqu’à 3h du mat? Eh bien non, puisqu’elle doit déguerpir à minuit, parce qu’à minuit, exit le brushing, et que sans brushing, pas de prince. tttsss…. Et blanche neige aussi, vous allez pas me faire croire qu’elle vit 24h/24 avec des nains et des animaux qui lui font le ménage et la popote sans aucune contrepartie?
(NB: je vous invite à ce sujet à lire « la psychanalyse des contes de fées » de Bettelheim, c’est très instructif et très déprimant)
2/Pas plus tard que le week end dernier, j’étais partie, d’humeur joviale et bucolique, passer un guilleret week end à la campagne, et plus précisément, le dimanche, aller faire une petite promenade en forêt à la cueillette aux champignons. Et, tandis que je commençais à m’énerver après avoir trouvé une quinzaine de champignons non-comestibles, surgit en mon esprit le passage où
Alice rencontre la chenille géante, qu’elle lèche des champignons et commence à devenir géante ou toute petite. Et puis là, tout d’un coup, après l’avoir visionné 457 fois petite sans avoir rien vu d’autre qu’une méchante chenille et un champignon magique, l’évidence m’a frappé: la chenille était complètement shootée au narguilé, et Alice est une camée dopée aux champignons hallucinogènes.
Et c’est là que j’ai réalisé ma décrépitude et la perte progressive et inéluctable de mon innocence cristalline, même si je persiste à sauter dans les flaques et à dire bonne nuit à mon vieux nounours tout fripé, quand personne ne regarde. Mon enfance court plus vite que moi, et ça craint du boudin, un peu, quand même.
Sic transit gloria mundi…caca boudin prout
Simple question en passant, Diane. Question qui vient à la lecture de cet article et surtout de son style,
Ton papa s’appelait Pierre ?
Ben ma pauvre ! Moi j’ai 24 ans et je regarde les walt disney avec mes yeux d’enfants. Ne rien penser et se laisser entrainer par la magie. Si tu ne rêves plus alors qu’est ce qu’il te reste ?
Lucas: nonnnnnnononnn, et au fait il se trouve que bien avant de découvrir Pierrot, j’avais déja un gros faible pour les phrases à rallonge et les jeux de mots, et j’imagine que sa découverte a dû accentuer la chose…voire même pas mal l’influencer, certes.
Magire: ne soyons pas si pessimistes, ce n’est pas parce que j’ai découvert qu’Alice était une camée que mes rêves se sont tous envolés d’un coup hein, sinon autant me tirer une balle.
Mais je vais pas faire semblant de pas le voir non plus, pour me cacher à moi même que je n’ai plus mon innocence d’enfant, c’est tout. Il m’en reste quand même des ptis bouts, et puis, il me reste des taaas de choses, t’en fais donc pas.
Mais, dans Blanche-Neige, le Prince tombe amoureux de B-N alors qu’elle est en haillons et sabots, comme quoi… ^^
Sinon, je crois que nous avons la même nièce. Elle m’a baptisée Babouche, mon copain Diego et a un sac de classe avec les princesses disney (et les poupées qui vont avec). Ah, et elle fait des allers-retours entre la cuisine et le canapé en hurlant « cacaaa » et en pouffant de rire. Ah là là, ces jeunes…